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Après Moubarak, pourquoi pas Bothaina Kamel ?

novembre 7, 2011

Dix mois après la révolution du 25 Janvier, l’Égypte prépare ses premières élections législatives le 27 novembre prochain.  Mais dans un pays marqué par 30 ans de dictature d’Hosni Moubarak, c’est surtout l’élection présidentielle qui mobilise les attentions et les candidatures. La première à se déclarer fut Bothaina Kamel, journaliste et activiste des droits de l’Homme.

Bothaina Kamel, candidate à l'élection présidentielle égyptienne. A l'arrière plan, son mari, l'avocat Ashraf Elbaroudi. © Ariane Lavrilleux

10 candidats, 1 femme déterminée

En tout, aujourd’hui, une dizaine de candidats se sont déclarés. Parmi eux Mohammed El Baradei, prix Nobel de la paix, ancien directeur de l’AIEA. Autre candidat « présidentiable » : le libéral Amr Moussa, ministre de Moubarak dans les années 1990, fait aussi parti des présidentiables. Les Frères Musulmans, donné favoris des élections législatives, se sont interdits de présenter des candidats. Mais Abdel Moneim Al-Fotouh,  membre dissident du mouvement islamiste, se présentera en son nom.

Face aux autres candidats qui appartiennent tous à une mouvance politique ou religieuse, Bothaina Kamel fait figure d’électron libre. Mais elle est connue des Égyptiens pour ses émissions de radio et télévision, notamment « Nightime confessions » où elle abordait des sujets de société souvent critiques à l’égard des pouvoir politiques et religieux. Victime de la censure sous l’ère Moubarak (elle avait du arrêter son programme sous la pression des militaires en 1996), elle fut l’un des porte-voix de la révolution du 25 janvier.

« On ne devrait plus se poser la question, pourquoi une femme se présente à la présidentielle ! »

Rencontrée au Caire,dans le hall d’un hotel (d’où la musique en fond), en pleine réunion politique avec des jeunes du Mouvement du 6 avril, Bothaina Kamel veut défendre la voix des femmes mais surtout de tous les laissés-pour-compte de la société égyptienne. Quand on lui demande pourquoi  elle, Bothaina, a voulu se présenter, la réponse fuse :

Sans appui partisan, Bothaina Kamel n’est pas non plus novice en politique. En 2005, elle créé le mouvement Shayfeen ( « We are watching you« ) pour contrôler les premières élections législatives multipartistes organisées par Moubarak. Elle révèle, preuves à l’appui, l’existence de nombreuses fraudes. Elle fonde également « Les Egyptiens contre la corruption » pour soutenir des projets et initiatives de citoyens égyptiens.

Si son nom et son visage sont connus, sa candidature attire plus les médias internationaux que les égyptiens. Dans un sondage réalisé fin août auprès de 2400 Égyptiens en age de voter, la journaliste ne recueille même pas 1% des intentions de vote. Mais si Bothaina Kamel ne décroche pas le titre de présidente, elle joue déjà un rôle politique important pour la démocratie naissante.

« Je suis censurée à la télévision égyptienne parce que j’ai critiqué l’armée au pouvoir »

Depuis le 11 février, et la mise en place du conseil militaire de transition, la censure n’a pas disparue des bonnes habitudes du régime.  Comme d’autres activistes et blogueurs, Bothaina Kamel en a fait les frais. Son émission de télé a été arrêtée parce qu’elle avait critiqué l’armée en mai dernier. Elle avait dénoncé (comme plusieurs associations de défense des Droits de l’Homme) la complicité de l’armée et de la police dans les massacres d’Imbaba au Caire.  Depuis le massacre de Coptes à quelques pas de la place Tahrir, le 9 octobre dernier, elle est carrément personæ non grata dans les médias égyptiens.

Parce que le 9 octobre,  elle se trouvait devant « Maspero », la TV égyptienne… et a vu une partie des exactions commises par l’armée, la police, et les « thugs » (c’est-à-dire des voyous encouragés voire payés par la police pour semer le trouble). Les médias n’ont pas apprécié qu’elle le raconte sur twitter et facebook.

Ariane Lavrilleux

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