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Une (bonne) réponse à l’inégalité salariale

décembre 2, 2011


              A ceux qui reprochent souvent aux féministes de ne pas s’intéresser aux « vrais sujets »[1], l’ouvrage Pourquoi les femmes gagnent-elles moins que les hommes ?, sorti en septembre dernier, apparaît comme un contre-argument. L’égalité hommes-femmes en terme de salaires et de postes – quoique fantasme petit bourgeois pour certains – en fait partie. C’est à ces injustices persistantes, tenants et aboutissants du « plafond de verre »[2] que Olympe/Brigitte Laloupe, blogueuse populaire et coach en entreprise s’attaque ici…

En France, en 2011, il reste entre 10% et 27% de différence salariale – selon les calculs[3] – entre les hommes et les femmes. Et les femmes sont de plus en plus rares quand on monte dans la pyramide hiérarchique des entreprises, privées ou publiques. Des phénomènes qui correspondent à des « effets individuels »…et des « processus inégalitaires ou discriminatoires qui jouent en défaveur des femmes à divers moments de leur carrière, voire en amont », selon la DARES. Brigitte Laloupe décrit un par un ces mécanismes psychosociaux, soit deux approches (sociologiques et individuelle) en une. Les attentes vis-à-vis des enfants, les stéréotypes transmis par la pub ou les médias, les milieux de pouvoir où l’entre-soi reste de mise, les attributs inconscients de la dominance, les règles du jeu particulières sont autant d’éléments décortiqués ici. Habilement dépecés. Explicités. Beaucoup semblent déconnectés du monde de l’entreprise a priori, mais tous ont une incidence sur les rapports de pouvoir qui s’y établissent. Dans la troisième partie, elle lâche – enfin ! – comment font celles qui réussissent. Plus subjectif, ce passage devient un guide, proche d’un bon ouvrage de management.

Dans cet essai de Brigitte Laloupe, on apprend peu de choses au final, surtout quand on est rodé à ces problématiques. Mais il a le mérite de faire un état des lieux des connaissances en 2011. Sans compter qu’il est très bien référencé. Toutes les sources sont citées avec une précision qui ferait rougir certains journalistes. Autre avantage ? Pas besoin d’être « féministe » pour l’apprécier, même si le fil conducteur l’est. Sans s’en cacher.

Léa Lejeune

3 questions à Brigitte Laloupe

Il existe déjà de nombreux ouvrages sur l’égalité professionnelle. Que pensais-tu pouvoir apporter ?

Effectivement, j’ai lu beaucoup d’études sur le sujet. Mais, à ma connaissance, il n’y avait aucune compilation ou synthèse. Les articles, et même les ouvrages qui sont publiés restent souvent destinés à des experts. Pourtant il me semble primordial que ces études soient connues du grand public… C’est une condition sine qua non pour que l’égalité progresse. On sait, par exemple, depuis longtemps, que les enseignants ne se comportent pas de la même façon avec les filles et les garçons, notamment quand il est question de sciences dures. Il y a dix ans, l’éducation nationale a publié des circulaires pour attirer leur attention là dessus. Qui le sait aujourd’hui ? Techniquement, aucune loi ne changera ces inégalités, les acteurs eux-mêmes doivent prendre conscience de leurs propres comportements et de ceux des autres à leur endroit.

– Jusqu’alors, tu étais blogueuse – connue mais anonyme – spécialisée dans les questions d’égalité et de féminisme. Pourquoi as-tu assumé ton identité cette fois ?
Mon éditeur m’a laissé le choix. Sortir de l’anonymat a été très difficile, surtout parce que mon blog (qui lui permet de faire le lien avec son lectorat, ndlr) est beaucoup plus militant et engagé que mon livre. Je n’étais pas sûre de pouvoir assumer cette étiquette militante au quotidien. Mais en restant anonyme j’avais le sentiment d’amoindrir le propos de l’ouvrage, de lui faire perdre de sa légitimité.

Par ailleurs, des journalistes m’ont souvent sollicitée pour des articles et des émissions de radios, j’en avais marre de ne pas pouvoir accepter, alors que je mourrais d’envie d’y aller.

– En quoi le fait d’être coach en entreprise a influencé ta manière de traiter le sujet du plafond de verre ?
Je suis coach depuis 3 ans mais j’avais commencé le livre bien avant. Mon expérience m’a permis de vérifier, aussi bien en sessions collectives qu’en coaching individuel, que beaucoup de femmes vivent exactement ce que je décris. (Le livre fourmille d’exemple de sessions de coaching où des femmes relatent leurs (mauvaises) expériences, ndlr). Aujourd’hui, les entreprises et les cadres me demandent souvent de travailler sur ce thème.

[1] Le débat Madame/Mademoiselle, lancé par Osez le féminisme et les Chiennes de garde a étonné, voire scandalisé, des éditorialistes, de nombreux lecteurs de la presse et commentateurs du web.

[2] « (Expression née) aux Etats-Unis dans les années 70 pour désigner les barrières invisibles et artificielles dressées sur le parcours (professionnel) des femmes. (…) Utilisée par l’Organisation internationale du travail, le plafond de verre désigne un obstacle qui limite de façon drastique l’accès des femmes aux plus hautes responsabilités. Cet obstacle est invisible puisqu’en théorie hommes et femmes ont les mêmes droits et les mêmes chances ».

[3] Le chiffre de 27% est en valeur absolue. Le second résultat est obtenu « toutes choses égales par ailleurs » (les temps partiels et heures supplémentaires qui créent des différences sont exclus ; les diplômes et l’expérience professionnelle sont les mêmes ; les interruptions de carrière, pour cause de congés maternité entre autres, sont exclues).

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